« Il faut bien que jeunesse se passe…mais
pas qu’elle trépasse ! »
D’ordinaire plus touchés par le chômage que
les autres actifs, les jeunes sont les premières victimes
d’une crise économique dont la virulence ne fait qu’accentuer
le caractère alarmant de leur situation.
En l’espace d’un an le nombre de demandeurs d’emploi
chez les jeunes de moins de 25 ans a augmenté de plus de
30%, une dégradation d’autant plus inquiétante
si l’on en juge par la configuration de la pyramide des âges.
Une telle perspective démographique était pourtant
porteuse d’espoir d’une amélioration très
nette de leur emploi à partir de 2009. Cependant la violence
de la crise actuelle assombrit cet horizon optimiste et renforce
la crainte des jeunes envers l’avenir.
Les jeunes, derniers entrés dans la vie active sont les
premiers à en sortir en période de récession,
la plupart d’entre eux occupant des emplois temporaires.
Leur entrée sur le marché du travail implique de franchir
le sas de la précarité : intérim, contrats
à durée déterminée, petits boulots,
emplois aidés, stages sous payés, avant de pouvoir
prétendre à un emploi stable et durable. Or à
la moindre baisse d’activité économique, ces
emplois sont les premiers supprimés par les entreprises.
Pour les plus jeunes d’entre eux, souvent sortis de l’école
sans diplôme, la voie de l’insertion professionnelle
est devenue désormais celle de la précarité.
Elle limite la réalisation de leur projet et fragilise leur
parcours professionnel. Faute de perspectives, elle les empêche
de s’investir pleinement dans la vie de l’entreprise.
Les firmes ne les appréhendent ainsi plus sous l’angle
d’une ressource humaine, mais plutôt d’un coût
salarial que la précarité permet de minimiser.
Le manque d’expérience ou de connaissance du métier
de la part des jeunes salariés représente un risque
que les employeurs n’osent plus assumer dans un environnement
concurrentiel de plus en plus fort, leur préférant
des salariés immédiatement productifs.
Dans de telles conditions, les jeunes ne peuvent pas acquérir
une première expérience professionnelle leur permettant
de construire leur avenir. Or tant que les entreprises auront cette
approche comptable rien ne changera.
Pour les plus qualifiés d’entre eux, si le diplôme
reste encore une garantie d’employabilité, la situation
dégradée de l’emploi rallonge sensiblement la
durée de passage de l’université à l’emploi,
alourdit considérablement le coût de leurs études
et accentue leur dépendance. Pour ces derniers l’espoir
d’une reprise économique pour 2010, ne leur garantit
pas nécessairement une meilleure employabilité, attendu
qu’en période de reprise, les entreprises préfèrent
le plus souvent, recourir d’abord aux heures supplémentaires
défiscalisées, avant d’embaucher.
Les jeunes restent ainsi sans emploi, et exclus des minima sociaux,
se trouvent confrontés à la pauvreté, alors
qu’ils sont les ressorts de la croissance de demain.
Face à l’urgence de la crise, l’extension du
RSA aux 18-25 ans semble insuffisante pour aider les jeunes, car
elle ne s’applique qu’aux jeunes sans emploi ayant déjà
travaillés au moins deux ans.
Alors pourquoi ne pas aider tous les jeunes selon des modalités
spécifiques à chacune de leur situation ?
Mais au-delà d’une allocation d’autonomie facilitant
leur insertion professionnelle, l’enjeu majeur demeure plus
que jamais l’accès des jeunes à l’emploi.
Paradoxalement, nombre de secteurs tels l’agriculture, l’hôtellerie-restauration,
ou encore le bâtiment, jugés trop pénibles,
mal payés et peu valorisants, ne trouvent pas de jeunes.
Un tel paradoxe révèle une mauvaise adéquation
entre formation et emploi qui pourrait se corriger par un rapprochement
de l’école et de l’entreprise. Une meilleure
synergie entre les deux permettrait une mutualisation des compétences
directement profitables aux jeunes. Ce qui revaloriserait les filières
professionnalisantes aujourd’hui désertées.
Elles pourraient ainsi attirer des jeunes dans ces métiers
leur ouvrant enfin de véritables trajectoires professionnelles.
En outre un tel dispositif ne sera efficace que s’il parvient
à concilier formation initiale et formation professionnelle
grâce à un partenariat entre le système éducatif
public et les entreprises. Cette alternance, devrait être
prise en charge par l’école publique et non par des
organismes privés, afin de protéger la formation contre
les risques de la précarité et, être assortie
d’un engagement d’embauche des entreprises bénéficiant
des aides fiscales. Certaines entreprises se sont engagées
sur cette voie, mais elles sont encore trop rares aujourd’hui
!
C’est un changement radical de mentalité qui est nécessaire
pour refonder la politique de l’emploi des jeunes. Il passe
par des mesures institutionnelles visant à associer les entreprises
et l’école publique à la construction de l’avenir
professionnel des jeunes.
Ce n’est qu’à cette condition que les jeunes
trouveront des emplois et que les entreprises leur feront désormais
réellement confiance.
Gérard Fonouni
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